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Orientation et réadaptation : des professions éveillées?

Les individus ayant une facette « éveilleur » à leurs champs d’intérêt peuvent-ils trouver leur compte dans des fonctions d’accompagnement en orientation ou en réadaptation en vue d’une insertion socioprofessionnelle? Est-il possible d’occuper ce rôle de manière à incarner le changement ?

Pour mieux connaître le profil éveilleur, consultez cet article.

Il s’agit d’un angle trop souvent insoupçonné de nos fonctions. Par exemple, les conseillers et conseillères d’orientation (C.O) sont souvent associés aux mots-clés « tests » ou encore « choix scolaires », qui font bien sûr partie de notre expertise. Cependant, cette vision est bien loin de couvrir tout ce qui est rencontré au jour le jour, en travaillant avec une variété de clientèle de tout horizon.

D’abord, notre rôle nous amène à voir la notion de privilège en gros plan au quotidien. L’orientation comme service à s’offrir à soi-même en relève, notamment. En effet, pouvoir bénéficier de l’accompagnement d’une professionnelle ou d’un professionnel pour mieux se réaliser et s’accomplir professionnellement est loin d’être à la portée de tous! Avec le soutien des tiers payeurs de services (Emploi-Québec, assurances, CNESST, PAE, etc.) nous pouvons offrir des services à une population plus générale et diversifiée. Nous constatons d’ailleurs fréquemment le regard d’incompréhension de certains individus provenant de contextes socio-économiques plus faibles quand on aborde les intérêts professionnels. « Ce que j’aime faire? Dans mon pays, on fait ce qu’on est capable de faire, là où il y a des besoins…ce que j’aime n’a jamais eu de lien avec mon travail! ».

Il s’agit là déjà d’un exemple déroutant de réalité nous invitant quotidiennement à nous décentrer de la nôtre, ayant eu le privilège d’abord d’avoir eu accès à de l’éducation et même d’avoir pu choisir notre parcours, ce qui n’est pas le cas partout ni pour tout le monde!

Notre rôle d’accompagnement étroit auprès de l’individu en orientation et réadaptation nous en fait voir de toutes les couleurs côté injustices diverses, souffrance physique et psychologique, enjeux psychosociaux et obstacles à l’insertion socioprofessionnelle. Nous baignons ainsi dans un contexte constant de conscience sociale. Des exemples de discrimination systémique pour une myriade de raisons, des victimes d’accidents graves de travail, des personnes laissées pour compte du système scolaire ou du système de justice, des situations de précarités de logement, et plus encore font partie du lot quotidien de notre clientèle.

Il peut être délicat, pour les conseillers et conseillères (comme pour tout autre professionnel ou professionnelle de la relation d’aide) d’être dans une position où l’on souhaite le mieux-être d’autrui sans pour autant avoir vécu une parcelle de sa réalité. Comment accompagner adéquatement quelqu’un vivant un deuil de ses 30 années de travail dévoué dans la construction qui ne peut maintenant plus se servir de son bras droit et qui n’a pas de scolarité? Un parent monoparental, qui parle à peine français, qui se fait menacer d’éviction de son logis et qui se sent en perte totale de repères ?

Comment conjuguer orientation, réadaptation et conscience sociale?

La conscience sociale est inhérente à notre rôle d’accompagnement en orientation et réadaptation. Notre rôle part d’une posture humble, de co-construction du processus avec la personne rencontrée. Ce rôle inclut une écoute ouverte, empathique et acceptante du récit de vie et de l’expérience subjective de la personne.
Le rôle de C.O. et de C.R. amène notamment à avoir un impact sur l’identité personnelle et professionnelle afin de la définir ou de la redéfinir. Par le fait même, une influence positive pour favoriser l’autonomie de la personne est exercée.

Il s’agit également d’un rôle incluant des fonctions d’éducation, de sensibilisation, de transmission d’informations (fonctionnement du système, par exemple) auprès de certaines clientèles vulnérables. Nous avons comme devoir d’identifier les enjeux systémiques interférents avec l’intégration socioprofessionnelle de la personne et de renvoyer aux ressources appropriées lorsque la problématique dépasse notre expertise. Notre rôle est aussi d’accompagner la personne dans la (re)-découverte de ses ressources internes et environnementales.

Il est possible de choisir un milieu de travail en concordance avec des valeurs d’inclusion, d’implications sociales et d’écoresponsabilité. Par exemple, tant au niveau de l’équipe de soutien des conseillers et conseillères que des services aux écoles, l’équipe de BrissonLegris accueille l’individu tel qu’il est avec un souci de bienveillance équitable peu importe son passé, ses croyances ou ses origines. L’équipe s’implique aussi dans différentes causes sociales et initiatives écoresponsables.

En somme, en se référant au rôle de l’éveilleur, pour qui le moteur est de promouvoir, sensibiliser, conscientiser, protéger… pouvons-nous nous retrouver dans un rôle en orientation ou en réadaptation? Est-il possible d’incarner un agent ou une agente de changement, à sa manière?
Selon moi, la réponse est oui, parole de C.O. avec une fibre éveilleur!
Alors les éveilleurs, pourquoi ne pas considérer une carrière en orientation, réadaptation ou en employabilité?

Par Marie-Noëlle De Sève, conseillère d’orientation chez BrissonLegris